Retour

Djokovic ou le mythe d’Icare

Janvier 2021. Melbourne. Déjà.

Avec 17 titres du Grand Chelem, Novak Djokovic est encore loin derrière Roger Federer et Rafaël Nadal qui affichent, eux, 20 majeurs.

Depuis qu’il a rejoint le sommet du circuit, il ne rêve que d’une seule chose : être considéré au même niveau que les deux monstres sacrés que sont le Suisse et l’Espagnol.

Fort et motivé comme jamais, Djokovic entame alors son envol vers la gloire.

Il gagne l’Australian Open en dominant Medvedev en finale et en trois sets.

20-20-18.

Le Serbe plane quand il arrive à Paris et Roland Garros.

Mené deux sets à zéro en finale par Stefanos Tsitsipas, il revient du Diable Vauvert et s’impose 6-4 au cinquième.

20-20-19.

Sur son nuage, le Serbe se rend dans la Mecque du tennis où il ne perdra que deux sets, un au premier tour, l’autre en finale.

20-20-20.

Djokovic a rejoint Federer et Nadal.

Mieux : il est dans une situation idéale pour dépasser ses contemporains et rejoindre une certaine Steffi Graf au sommet du mont Olympe. En 1988, l’Allemande a en effet réussi l’exploit sidérant de remporter les quatre levées du Grand Chelem ET la médaille d’or des Jeux Olympiques.

La tête de Djokovic semble rester fraîche mais l’envol commencé à Melbourne l’amène tout doucement près du soleil qui l’aveugle et des ambitions qui sont siennes.

Il arrive à Tokyo, où se déroulent en 21 les JO de 2020.

Il balaye ses quatre premiers opposants, ne leur laissant que des miettes. Il inflige même un sévère 6-2 6-0 au joueur local Kei Nishikori.

Le voilà à deux succès de l’or. Or dont la couleur est celle du soleil.

Il rencontre en demi l’Allemand Alexander Zverev. Premier set rondement mené : 6-1 Djokovic.

Mais la machine se grippe. 6-3 6-1 Zverev. Le Grand Chelem doré s’échappe.

Reste malgré tout le Grand Chelem classique, remporté la dernière fois par Rod Laver en 1969.

Le vol de Djoko a connu une turbulence mais on est encore loin du crash.

On ne le voit plus entre Tokyo et New York où se tient le dernier Grand Chelem 2021.

L’objectif reste énorme : dépasser Nadal et Federer et rejoindre la légende Laver.

Novak souffre un peu, mais atteint les demis où il bataille face à … Alexander Zverev. Il s’impose en… cinq sets. Et  n’est donc qu’à un succès de son graal.

Face à lui, un redoutable adversaire – Daniil Medvedev – mais Djoko en a vu d’autres.

6-4 6-4 6-4 pour le Russe.

20-20-20.

L’année 21 du Serbe n’est évidemment pas ratée (diantre, trois majeurs ce n’est pas rien), mais à deux reprises, à Tokyo et New York, il a raté une occasion sans doute unique, non pas de marquer l’histoire du tennis mais bien de rejoindre au sommet de la notoriété sportive les mythes que sont, par exemple, Carl Lewis, Eddy Merckx, Cassius Clay, Jesse Owens, Mark Spitz et quelques autres encore.

En fait de mythe, c’est surtout celui d’Icare auquel Djokovic a été confronté.

A force de voler trop près du soleil, il semblerait que son cerveau, à défaut de plumes, ait surchauffé.

Il semblerait qu’à force de se croire invincible, il a baissé la garde et commencé à perdre le fil. Le fil d’Ariane qui aurait pu le sortir du labyrinthe australien dans lequel il s’est lui-même placé. Un labyrinthe que n’aurait pas renié Dédale, le père d’Icare.

Dans Icare, il y a I Care.

Hélas !, Djoko, lui, doesn’t care.

Il s’en mordra sans doute le bout des ailes.