Depuis vendredi, ce sont ces images des Temps Modernes de Charlie Chaplin qui ne cessent de nourrir mon imagination. A vrai dire, je ne vois pas d’autres moyens d’illustrer la prestation invraisemblable de Jannik Sinner face à Novak Djokovic.
Dans cette métaphore, Jannik Sinner est bien évidemment la machine qui, quoi qu’il se passe autour d’elle, n’a de cesse de faire rouler le tapis et, donc, de redonner de l’ouvrage à Charlie Chaplin.
Ce dernier, comme l’a fait moult fois Novak Djokovic, a bien essayé de prendre la mesure du rythme métallique et insensé mais rien n’y a fait.
Ni la créativité du Serbe, ni la volonté de Chaplin, ne peut vaincre la robustesse et l’insouciance apparente de la machine ou de Sinner.
Venant d’une réelle machine faite d’acier, cette insouciance n’a rien de surprenante. Provenant d’un jeune joueur de tennis, cela l’est davantage. Et pourtant, vendredi, à aucun moment, même quand le vainqueur de 24 tournois du Grand Chelem a haussé son niveau de jeu, l’Italien n’a semblé être perturbé. Ni par la pression de la demi, ni par le génie créatif de son adversaire, ni du fait de l’expérience de ce dernier.
Non, sans cesse, Sinner est resté de marbre. Un cas rare que ce match pendant lequel les deux joueurs ont proposé une version ultime de leur tennis, l’un des deux étant cependant mis devant l’énervante évidence que, quoi qu’il fasse, il n’y arrivera pas.
C’ets comme quand, petit et déjà passionné de tennis, les gamins que nous avons tous été jouaient contre un mur. Lequel, imperturbable, relançait nos envois, sans se soucier du talent éventuel qui était le nôtre.
Avouez-le, vous avez souvent cru que vous pourriez détruire ce mur et, parfois, même, vous avait fait semblant de le battre en comptant des fautes qu’il n’avait pourtant pas commises.
Jannik Sinner est plus qu’un mur, plus qu’une machine. C’est un être humain doté d’une capacité à lire le jeu de l’autre, à distiller le sien avec une perfection proche de 100%
Sinner ne fait JA-MAIS, d’erreur.
Il ne donne JA-MAIS de points gratuits.
Sa cadence, sa régularité, sa vitesse de balle abrutissent petit à petit son rival.
Vendredi, on a vu Novak Djokovic sourire. Pas parce qu’il était content de perdre, évidemment, mais bien parce qu’il avait pleine conscience du fait que, quoi qu’il fasse, quoi qu’il tente, quoi qu’il invente, il n’y arriverait pas.
Tout comme Charlie Chaplin, sans doute plus naïf dans le Temps Modernes que Novak Djokovic sur le Chatrier, savait que la machine gagnerait toujours.
Messieurs, après l’exceptionnel spectacle du match entre Ben Shelton et Carlos Alcaraz, vous avez offert au monde du tennis ce que je me permets de qualifier de rencontre parfaite.