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Coupe Davis: les larmes de joie et de déception

Suite et fin (provisoire) de notre promenade dans l’histoire de la Belgique en Coupe Davis. Une fin qui nous mène d’Allemagne à Lille pour une deuxième finale en … trois ans. Un exploit qui aurat pu se terminer en triophe.

Voici le récit que j’en avais fait au lendemain de la défaite en France.

Je n’ai pas mis une photo de la défaite mais bien de la victoire face à l’Australie.

AUX LARMES CITOYENS

Des larmes.

Des yeux qui brillent.

De bonheur.

On est en Allemagne, en début d’année. Privés de leur pote David Goffin, Joris De Loore et Ruben Bemelmans battent les frères Zverev 6-3 au dernier set d’un match improbable dont l’issue était quasi vouée aux Allemands. La Belgique mène 2-1 lors de ce premier tour de Coupe Davis.

Des yeux humides.

De bonheur, de fierté.

On est en Allemagne, en début d’année. Privé de son pote David Goffin, Steve Darcis vient de qualifier la Belgique pour le deuxième tour de la Coupe Davis. Il a battu un certain Alexander Zverev en quatre sets. Oui, ce Zverev qui livrera une saison incroyable pour entrer dans le Top 3 mondial.

La Belgique, privée de David Goffin, est au deuxième tour de la Vieille Dame. Un exploit quasi sans précédent pour cette équipe dont certains se plaisaient à dire qu’elle ne battait jamais de grosses formations.

Des larmes.

De joie, de fierté.

On est à Bruxelles, en demi-finale. David Goffin vient de livrer un match exceptionnel face à un Nick Kyrgios qui avait pourtant servi le feu au premier set. Mais, déjà en route pour sa fin de saison exceptionnelle, le Liégeois a damé le pion à cet étonnant Australien qui se perdra dans les méandres des diagonales tissées par son rival du jour.

Des larmes. De joie.

D’une équipe, d’un staff, de tout un pays tennistique.

On est à Bruxelles, toujours.

Steve Darcis, pour la deuxième fois en trois ans, propulse l’équipe belge en finale de la Coupe Davis. Une performance sidérante pour un pays comme le nôtre.

A Gand, dans l’incompréhension amusée de quasi tout son auditoire, Johan Van Herck avait promis de refaire le coup de 2015, rapidement, très rapidement.

Il a tenu parole.

Des larmes.

De tristesse, d’effondrement.

On est à Lille.

Samedi.

Ruben Bemelmans s’effondre à l’issue de son double qu’il a a livré avec son amis Joris. Il a servi à un set partout, 5 jeux à quatre.

A ce moment, les joueurs, le staff, le public, croyaient toucher le Saladier du bout des doigts.

La pression a été trop grande pour Ruben. Qui ne passera pas une première balle.

5-5 pour Gasquet et Herbert.

Et ensuite 2-1 pour la France car la paire belge, courageuse, volontaire, complémentaire, ne se remettra jamais de ce jeu de service perdu.

Des larmes.

D’acier.

On est à Lille, toujours, bien entendu.

Le finaliste du Masters poursuit sur sa lancée. Face à un Jo-Wilfried Tsonga époustouflant dans le premier set, le Liégeois ne s’en laissera pas conter. Il bombe le torse, perce son regard, accélère sa course, retourne comme un dieu et trouve, encore, toujours, des trajectoires inouïes de précision.

Comme Kyrgios deux mois plus tôt, Tsonga s’englue dans la toile habilement dessinée par son adversaire du jour. La puissance ne sert à rien face à la précision et la détermination. Et aussi l’intelligence tactique.

Des larmes d’acier coulent virtuellement sur les joues de David Goffin qui vient de mettre un terme à sa saison somptueuse.

Des larmes.

Encore et toujours.

On est à Lille.

C’est le dernier match.

Il n’a pas duré longtemps.

Le Gladiateur est pris à la gorge dès le début de la rencontre.

Très vite, il sait, on sait, tout le monde sait, qu’il ne pourra pas le faire.

Les jeux défilent.

Les regards sont tristes et désespérés.

Le capitaine harangue son banc, son joueur, le public.

Mais il n’y a pas de doute.

Le Saladier, poussé vers la frontière par David Goffin, ne la franchira pas.

Le Saladier va rester en France.

Steve le sait.

Darcis s’en veut.

Le Gladiateur souffre.

Ce match, c’était le match d’une vie.

Mister Coupe Davis mange, boit, respire pour son équipe nationale.

Il voulait tout donner.

Il a tout donné, mais ce n’était pas suffisant.

Il se bat de l’intérieur mais cela ne se voit pas de l’extérieur.

Des larmes, déjà, encore, coulent dans la tribune belge. Les femmes pleurent.

La maman de Steve pleure.

Le papa de Steve pleure.

La femme du capitaine pleure.

L’épouse du Gladiateur pleure.

Tout le staff ne peut cacher sa tristesse.

Il y a la défaite, bien entendu.

Mais ce n’est pas le pire. Loin de là.

Le tennis n’est que tu tennis.

Non, s’ils pleurent, si elles pleurent, c’est parce qu’ils savent, elles savent que Steve Darcis la voulait cette victoire.

Ils savent, elles savent que c’est injuste pour ce grand monsieur du tennis belge de n’avoir pas réussi à relever le défi.

Ils savent, elles savent, qu’il va s’en vouloir.

Des jours entiers, des mois entiers.

Alors, ils et elles pleurent.

Pour cet être si cher, cet homme si bon, si généreux.

Ce joueur de tennis si souvent blessé mais qui, toujours, se relève.

Ils pleurent.

Elles pleurent.

Et je pleure aussi.

Pas parce que l’on a perdu.

Non on a le droit de perdre.

Je pleure devant tant de tristesse.

Sur son banc, Steve a le regard vide.

Il souffre dans sa chair.

Il sait que, sans doute, cela n’arrivera plus.

Il sait, Steve, qu’il ne va pas en rajeunissant.

Il sait Steve, que le Saladier n’a jamais été aussi proche.

Alors, il s’en va.

Vers le vestiaire.

Dévasté.

Mais entouré des siens.

Qui le regardent s’éloigner, l’échine courbée, la tête basse, le corps meurtri.

Ils et elles pleurent.

Mais qu’ils et elles se disent que ce n’est que du tennis.

Que du tennis.

Du sport.

Rien que du sport.

Des larmes.

Encore, toujours.

Des larmes.